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Les épidémies et programmes de vaccination au Québec de 1635 à 1980
Souvent, lors de recherches en généalogie, on s’étonne du fait que plusieurs de nos ancêtres meurent à des dates très rapprochées. Par exemple, on constate le décès du mari, de l’épouse et d’enfants sur une même courte période. Quelle est la cause de ces décès ? Les actes d’inhumation mentionnent, à l’occasion, la cause du décès mais souvent ils sont muets. Il est intéressant dans ces cas de vérifier si la cause du décès n’était pas due à une épidémie. Même si, comparativement à l’Europe au XVIIe et au XIXe siècle, la Nouvelle-France fut beaucoup moins affectée par les épidémies, il y en eut cependant plusieurs.
Période 1600-1700
1635 à 1802
Émergence de la variole et du typhus au Canada La variole fait sa première apparition probable au Canada en 1635; une épidémie est rapportée en 1702. Le typhus est signalé pour la première fois au Canada en 1659. Ces deux maladies font des ravages chez les colons de la Nouvelle-France et déciment les tribus autochtones, dont certaines disparaissent presqu’entièrement.De nouvelles épidémies de variole surviennent au Canada en 1732, 1755, 1765 et 1783. Au cours des années 1760, les troupes anglaises distribuent aux Iroquois de façon délibérée des couvertures utilisées par des patients atteints de variole comme arme biologique.
1687
Épidémie de rougeole dans toute la colonie. L'épidémie de fièvre pourpre (typhus) et de rougeole de 1687 aurait causé la mort d'une vingtaine de personnes à Lachine entre le
mois d'août et la fin de décembre de cette année. Les mentions de fièvres (8 cas), de maladies (7 cas), de flux de ventre (1 cas) et probablement de pleurésie (3 cas) doivent être associées à cette épidémie (Landry et Lessard 2008)
1699
Épidémie de picote ou petite vérole, 100 morts mentionné pour toute la colonie [ndr: variole].
Période 1700-1800
1701
Épidémie de picote ou petite vérole durant l’hiver à Québec qui emporte plus de 100 victimes [ndr: variole].
1702
Épidémie de petite vérole ou variole débutant en novembre à Québec. Elle s’étend rapidement à toute la colonie et fait 2000-3000 morts incluant les Amérindiens, pour la colonie seule on mentionne de 1000 à plus de 1200 habitants qui succombent à la maladie, soit environ un peu plus de 80 décès par 1000 habitants. L’épidémie fait de 200 à 300 morts dans la ville de Québec pour une population d'à peine plus de 2000 habitants, ils furent tous inhumés dans un nouveau cimetière ouvert sur um terrain acheté près de l'Hôtel-Dieu et qui reçut le nom de Cimetière des Picotés. À Lachine, 21 des 22 décès dus à la picote sont imputables à cette épidémie qui a frappé entre le 18 décembre 1702 et le 6 juin 1703, les femmes enceintes ou en couches étant particulièrement vulnérables (Landry et Lessard op cit)
1710>
Épidémie de fièvres malignes, appelées maladie de Siam, dans toute la colonie (non détaillé).
1717-1718
Épidémie de fièvres malignes dans toute la colonie (non détaillé).
1729
Épidémie de picote ou petite vérole (non détaillé, ce n'est mentionné "qu'en Colonie d'Amérique"), [ndr: il pourrait s'agir de la variole].
1733
Disette et épidémie dont on compte jusqu’à 2 000 malades en même temps à l’Hôpital Général de Québec. Le 18 octobre 1733, Mère Duplessis de Sainte-Hélène écrit dans une lettre à Mme Hecquet de la Cloche, à Abbeville, en France: « Nous avons été accablées de malades toute l’année. La petite vérole a couru toute la colonie. Il en est mort un nombre prodigieux de Sauvages. Il y a parmi eux des nations presque détruites. Les Français l’on eue aussy. L’on compte dans les villes de Montréal et de Québec plus de 700 personnes mortes. Notre hôpital en a été sy remply que nous avions doublé les lits pour en soulager d’avantage et qu’à peine pouvions-nous passer dans les salles. Tout le monde voulait venir chez nous, parce qu’on y mourait peu; en effet de plus de 500 dont nous avons eu soin, il n’en est mort que 17.»
1734
Épidémie de variole ou "fièvre maligne' dans la colonie. L’une des Hospitalières de l’Hôtel-Dieu de Montréal relate son expérience lorsque Montréal aété frappée par ce que l’on appelait la "fièvre maligne". Difficile de déterminer la nature exacte de cette maladie, mais sa contagion était assurément meurtrière. « Nous étions dans un abandon total, personne, avec raison, n’osant approcher de nous », a-t-elle écrit. « Tout le monde avait autant peur de nous et de tout ce qui pouvait nous avoir touchées que de la maladie elle-même. »
1735
Grave maladie contagieuse (non spécifiée) à Montréal apportée par les vaisseaux du roi (non détaillé).
1743-1745
Épidémie de typhus dans toute la colonie (données imprécises).
1748
Augmentation anormale des décès à l'Hotel-Dieu de Québec, ce qui laisse supposer une maladie contagieuse. Source: Registre journalier des MALADES de l’Hôtel-Dieu de Québec, par Marcel Fournier et Gisèle Monarque, Archiv-Histo, 2005.
1749
Épidémie de fièvre et décès nombreux mais non détaillé.
1750
Épidémie de typhus dans toute la colonie (non détaillé).
1755
L’année de la "grande picote", épidémie de petite vérole ou variole qui aurait peut-être été transportée par les troupes revenues de Carillon au sud du lac Champlain - une information probablement erronnée car 1759, le fort fut Carillon fut détruit et la garnison retirée pour venir défendre Québec la même année.L'épidémie en Nll-France est une manifestation locale d’une épidémie globale qui sévit en Amérique du Nord de 1755 à 1782.
1756-1759
On fait mention d'une épidémie de typhus dans toute la région habitée (non détaillé).
1765
On fait mention d'une épidémie de nature inconnue qui fait monter le taux de mortalité dans la colonie (non détaillé).
1765-1796
Variolisation au Canada La variolisation (c’est-à-dire inoculation du virus de la variole prélevé à partir des lésions d’un sujet atteint d’une forme bénigne de la maladie ou lui-même variolisé,afin d’éviter une forme grave de la maladie) est employée pour la première fois au Canada (Québec) en 1765. Cette mesure sera employée pendant une cinquantaine d’année. En 1769 le chirurgien militaire anglais James Latham variolise 303 personnes éminentes de la ville de Québec et ensuite 200 personnes de Montréal; jusqu'à son départ en 1770, il aura pratiqué la variolisation sur 1250 individus. La majorité des troupes britanniques sont variolisées, alors que les troupes américaines attaquant Québec en 1775 ne le sont pas; une épidémie de variole parmi ces dernières aurait forcé leur retrait. En 1796, les autorités permettent la variolisation des tribus Mohawk du Haut Canada.
1773-1786
Une épidémie d’une maladie (vraisemblablement la syphilis) survient à Baie Saint-Paul et se propage dans la province; elle est qualifiée de « Mal de la Baie-St. Paul ». Des médecins sont dépêchés sur les lieux pour traiter (surtout avec le mercure) les malades aux frais du gouvernement.
1783
Durant l’hiver, 1 100 personnes meurent de la "picote" et des "fièvres rouges" [ndr: il pourrait s'agir de la variole] (non détaillé).
1784
La plus grande épidémie de variole depuis 1760 affecte plus particulièrement la région du Richelieu, on rapporte que c'est la pire, la plus cruelle de toute l'histoire de la région du Richelieu. Le nombre de décès de cette année double par rapport aux années précédentes.
1796 à 1800
Création du premier vaccin et introduction de la vaccination au Canada. Le Dr Edward Jenner développe et utilise le premier vaccin contre la variole (à partir du virus de la vaccine de la vache [cowpox])en 1796; il publie les résultats de ses expérience en 1800. Le Dr John Clinch, confrère de classe de médecine de Jenner, missionnaire médical à Trinity, Terre-Neuve, débute la vaccination pour la première fois en Amérique du Nord, probablement vers 1799, après avoir obtenu le produit sous forme de lymphe de veau ou de matériel séché de son collègue. La vaccine est propagée de bras à bras à partir d’un premier sujet inoculé.
1797
Une épidémie de nature inconnue touche le Québec, on en connait ni la cause ni l'envergure.
Période 1800-1900
1802
Introduction de la vaccination au Québec La vaccination Jennérienne contre la variole est introduite en 1802 dans la province (Darmon, Pierre, La longue traque de la variole. Les pionniers de la médecine préventive. Paris, Perrin, 1986).
1809
On signale en plusieurs endroits une épidémie appelée "melancholy epidemy", cette maladie de nature inflammatoire se soigne par la saignée. Envergure et mortalité inconnus.
1819-1821
Épidémie de variole qui a décimé une grande partie de la population amérindienne.
1832 à 1834
Premières épidémies de choléra à Québec et à Montréal. En 1832, le choléra asiatique sévit en Europe occidentale; les émigrés d’Angleterre et d’Irlande atteints de la maladie sont débarqués au poste de quarantaine de Grosse-Île, mais les contacts ne sont pas mis en isolement et certains passent alors qu’ils incubent la maladie. Près de 11 000 cas surviennent au Québec entre juin et septembre 1832, dont plus de 6 800 décès. On dénombre 36 décès parmi la garnison de la Citadelle de Québec, et de juin à septembre, la région de Québec compte plus de 3000 décès. Dans la Vallée du Richelieu, Belœil et Saint-Hilaire sont particulièrement touchés, 22 victimes à Belœil en 1832 et 27 à Saint-Hilaire. Pour l'ensemble de la province on estime le nombre total de décès à près de 10 000. On rapporte 16 mortalités à Trois-Rivières. « Le taux de mortalité pendant l'épidémie est de 46/1000 habitants pour la province avec des pointes de 74/1000 à Montréal et de 82/1000 à Québec (comparativement à 37/1000 hors épidémie) jusqu'au mois d'octobre de l'année » (Goulet 2020). Il y a une recrudescence en 1834 qui cause 35 victimes à Belœil et 11 à Saint-Hilaire. Par ailleurs, Côté-Gendron (2020) mentionne des cas de choléra inscrits dans des actes de décès ou de sépultures de certains individus et souline l'importance de cette épidémie majeure.
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1842 à 1854
Épidémies de variole au Québec 1849 à 1854. Autres épidémies de choléra au Québec Une nouvelle épidémie de choléra survient en juin 1849, causant 700 décès à Montréal et 1 052 à Québec; l’origine aurait été les États-Unis, via l’Ontario. En 1851 et 1852, des épidémies de choléra, de provenance des États-Unis, causent 249 décès à Québec, et ensuite 155 décès dans ses environs. En 1854, on assiste à une autre épidémie de choléra importé à Québec (724 décès) et Montréal (1 086 décès).
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1847-1848
Épidémie de typhus au Québec et au Canada Près de 18 000 décès dus au typhus surviennent en 1847 et 1848 chez des immigrants au Québec et au Canada, surtout de provenance d’Irlande. Il n'y a pas de chiffres spécifique pour le Québec mais le nombre d'hospitalisation laisse deviner l'ampleur - 13 189 à Montréal, 8 691 à Grosse-Ile, 3 313 à Québec - 42 540 pour l'ensemble du Canada (Goulet 2020). Les facteurs prédisposant liés à l’hôte et les conditions de voyage en mer amplifient la propagation de cette maladie; les mesures visant à contrer sa transmission et sa létalité sont insuffisantes. Cette traguqie épidémie est à l'origine de quelques 75 bureaux de santé formés au Québec dans les années qui vont suivre.
1849.
Retour du cholera. L'épidémie pénètre au Québec en provenance peut-être des Étas-Unis et affecte la population pendant près de 5 mois. Elle cause plus de 1 000 morts à Québec et près de 700 à Montréal. Entre 1851 et 1852 le cholera continuera de se manifester mais avec un moindre mal, ne causant qu'un peu plus de 100-300 décès (Goulet 2020).
1854
Dernière épidémie de choléra à Québec à l’été (non détaillé).
- En 22 ans, jusqu'en 1854, les épidémies ont fait 8300 victimes à Québec seulement.
- Le 1er janvier 1862, le Canada-Uni décrète la vaccination obligatoire pour la variole pour tous les enfants de trois mois. Ce sont les villes qui chapeautent les opérations.
En 1867
, la tuberculose est la première cause de décès au Canada (non chiffré).
1869-1870
Épidémies de fièvre scarlatine (1869) et de coqueluche (1869-1870).
1872 à 1874
Épidémie de variole Une épidémie de variole sévit à Montréal en 1872-1873; cette maladie demeurera à l'état endémique jusqu'en 1881. La pandémie frappe principalement les villes portuaires en bordure du Saint-Laurent. En 1874, 981 décès sont causés par la variole dont 953 (97,2 %) parmi les Canadiens-Français. La production d’un vaccin animal (inoculation de génisse) est débutée pour remplacer le vaccin humanisé contre la variole.
1875-1885
Des statistiques sur les décès dans la population sont publiées. Le taux brut de mortalité est de 34,5/1 000 habitants à Montréal en 1875. Depuis 1879, il oscille de 25,6 ‰ à 27,4 ‰ et fait en 1885 un bond record à 53,5 ‰. La tuberculose cause de plus environ 400 morts annuellement à Montréal et se situe au premier rang des causes de décès. Il est noté qu'en 1875, la plupart des juridictions du Canada avaient réussi à enrayer la variole et étaient sorties de la crise provoquée par cette dernière pandémie. Pourtant, la ville de Montréal n'y était pas parvenue et la maladie y persista jusqu'à la fin de la décennie (Bliss, Michael, Montréal au temps du grand fléau. L'histoire de l'épidémie de 1885, Montréal, Libre expression, 1991). En 1879, les officiers du Bureau de Santé de Montréal établissent un lien entre la surmortalité et les logements insalubres.
1879
Épidémie de fièvre typhoïde à Montréal - voir plus haut.
1880 et 1885
Épidémies de rougeole à Montréal - non détaillé, voir plus haut.
1885
Épidémie de variole au Québec et à Montréal. Une épidémie de variole survient au Québec en 1885, avec 19 905 cas et 5 864 décès dans la province, dont 3 259 chez des citoyens de Montréal et sa banlieue; de ces derniers, 86 % sont des enfants de moins de 10 ans. Au plus fort de l’épidémie, soit vers la mi-septembre, 30 personnes par jour meurent de la variole à Montréal et 218 dans la seule semaine du 16 au 23 septembre. Ce sont surtout les enfants qui sont atteints par la maladie.
1885
Vaccins contre le choléra et la rage. Le médecin espagnol Jaime Ferrán (1851-1929) développe un vaccin contre le choléra. Son vaccin sera le premier à immuniser les humains contre une maladie
bactérienne. Le Pr Louis Pasteur prévient la rage chez un enfant de 9 ans (Joseph Meister) par la vaccination post-exposition (morsure par un chien rabique) contre la rage.
1887-1891
Nouvelles épidémies de maladies infectieuses au Québec. Des épidémies de diphtérie, de variole, de scarlatine, de fièvre typhoïde et d’influenza sont signalées au Québec - non détaillé.
1887
La polémique qui oppose vaccinateurs et anti-vaccinateurs habite les esprits et la population n'est pas convaincue de la protection que peut lui apporter la vaccination. Les campagnes des anti-vaccinateurs et les effets douteux provoqués en 1885 par l'emploi de vaccins insuffisamment contrôlés, mal choisis et administrés de manière non conforme aux prescriptions de l'hygiène, ont contribué à ralent l'utilisation de cette méthode dans la province
1889
Épidémie de picote [ndr: il pourrait s'agir de la variole] (non détaillé).
- Pandémie de grippe de 1890 au Canada. La grippe de 1889-1890, parfois nommée la grippe russe ou asiatique, est décrite comme la première pandémie d’influenza mondiale. Le virus s’est propagé par les routes de transport moderne, particulièrement les chemins de fer. Le Canada a connu une éclosion nationale. Cette pandémie a été moins mortelle que la pandémie d’influenza de 1918. Néanmoins, en 1918, le risque a été plus important pour les survivants de la pandémie de 1890 que pour le reste de la population. Les premiers cas de grippe, causés par un virus de la grippe A, apparaissent en Russie en octobre 1889 ou avant. Le virus se propage rapidement en Asie centrale et en Europe. Des bateaux transatlantiques transportent la grippe jusqu’en Amérique du Nord en quelques mois à peine faisant probablement son entrée au Canada par le port d’Halifax. En quelques semaines, la grippe se multiplie sur tout le continent. Les conseils de santé provinciaux sont actifs à temps plein au Canada depuis quelques années seulement. L’Ontario est la première province à créer un conseil en 1882, suivie par le Québec et le Nouveau-Brunswick en 1887. Malgré l’existence de ces agences, les chercheurs ne sont pas capables de dresser un tableau complet de la pandémie de grippe au Canada. Ils doivent utiliser les articles de journaux et les actes de décès pour leurs recherches. On estime qu’entre 25 et 60% de la population de l’époque est infectée. Les taux de décès varient selon les pays. Toutefois,la grippe tue moins de 0,17% des personnes infectées, y compris au Canada. La grippe de 1890 est moins mortelle que celle de 1918, qui va tuer environ 0,6% de la population canadienne.
1892
Introduction du sérum antidiphtérique. L’utilisation du sérum antidiphtérique est introduite, entraînant la chute remarquable de la létalité par diphtérie.
1893 à 1895
Épidémie de fièvre scarlatine à Montréal. Une épidémie de fièvre scarlatine survient à Montréal durant l'hiver 1893. La ville de Montréal ouvre deux hôpitaux (anglophone et francophone) pour traiter et isoler les cas. Leur contrôle est confié au Montreal General Hospital et à l'hôpital Notre-Dame : l’hôpital francophone est établi dans l'ancien Hôpital Civique de la rue Moreau et débute ses activités en février 1894. Jusqu'au 31 juillet 1895, ce dernier aaccueillera 160 jeunes patients, dont 29 décéderont. L’épidémie persiste jusqu'en 1895, causant 687 victimes.
Période 1900-1980
1900
Un premier sondage sur la vaccination contre la variole. Un sondage effectué en 1900 par le Conseil provincial d’hygiène auprès des 1 406 médecins de la province détermine leur position au regard de la vaccination antivariolique : 1 371 (97,5 %) sont en faveur, 11 (0,8 %) y sont opposés, 2 (0,1 %) refusent de répondre et aucune réponse n’est reçue de 22 (1,6 %).
1901 à 1907
Statistiques sur la mortalité et la morbidité au Québec. Les statistiques sommaires donnent un aperçu de la mortalité globale et la morbidité due à certaines maladies infectieuses au Québec au début des années 1900.
1901 à 1903
La diphtérie, la scarlatine et la variole. En 1901, 316 cas de diphtérie sont signalés à Montréal, dont 83 (26 %) nécessitent une hospitalisation; 83 décès (létalité de 26,2 %), alors que 8,4 % des cas hospitalisés (à l’hôpital civique) meurent. La même année,1 157 cas de scarlatine surviennent, dont 166 (14 %) sont hospitalisés; 245 décès (létalité de 21,1 %), contre 35 % des ceux hospitalisés. Une nouvelle épidémie de variole survient à Montréal en 1901. Elle affecte les chantiers québécois durant l'hiver 1901-1902. Son contrôle dans les campements de chantiers est malaisé vu l’absence de réglementation spécifique les concernant. Lors de la récurrence de cette maladie en 1903, le Conseil provincial d'hygiène ordonne aux municipalités de rendre la vaccination antivariolique obligatoire. En 1903 on dénombre 2500 cas de variole. (Rapports annuels du Conseil d'hygiène de la province de Québec, 1903 à 1925, 516 en 1904, 493 en 1905 principalement au Saguenay, 876 en 1908 principalent à Gaspé, 1470 en 1911, 2150 en 1912, 2825 en 1913, 1155 en 1914, 2125 en 1915 principalement dans Labelle)
1909-1910
Épidémie de fièvre typhoïde de source hydrique à Montréal. Une épidémie de fièvre typhoïde de source hydrique survient à Montréal en 1909-1910, causant 300 morts parmi les 3 000 personnes atteintes (létalité de 10 %). Un hôpital d'urgence est établi sur la rue Guy et de nombreux malades sont hospitalisés à l'hôpital Saint-Paul.
1910
Rapport de la Commission Royale de la tuberculose. La "peste blanche" frappe si durement le Québec au début du 20e siècle que les tuberculeux sont longtemps considérés comme une catégorie sociale à part entière; Ceux que l’on appelle les "poitrinaires" sont beaucoup plus nombreux au Québec que dans tout le reste du Canada, ce qui est resté pendant très longtemps une caractéristique de la société québécoise canadienne-française. De 1900 à 1951, première moitié du XXe siècle, la tuberculose a fait 150 000 morts dans la province de Québec - un désastre stupéfiant! (Côté 1997).
1911
Persistance de la diphtérie et de la scarlatine. La diphtérie et la scarlatine sont les deux principales causes d'admission dans les hôpitaux Saint-Paul et Alexandra en 1911. La létalité par la diphtérie est de 25/192, soit 13 %, dans le premier hôpital, et de 23/240, soit 9,6 %, dans le second. La létalité par la scarlatine est de 24/301, soit 7,9 %, et de 26/422, soit 5,5 %, respectivement.
1916
Épidémie de paralysie infantile. Une épidémie de poliomyélite cause 109 cas à Montréal.
1918
Premier vaccin canadien contre la coqueluche
1918-1919
Pandémie de grippe espagnole. La pandémie de grippe espagnole atteint le Québec en 1918-1919; apparaît en septembre 1918 chez des soldats de Saint-Jean-sur-Richelieu. Les mesures préventives les plus modernes pour l’époque sont pourtant mises en œuvre : isolement des malades, port du masque, fermeture des lieux publics, interdiction de rassemblement, érection d’hôpitaux temporaire, distribution de circulaires à la population indiquant certaines mesures préventives, réglementation des heures d’ouverture des commercesplus d’un demi-million de cas d’influenza, incluant jusqu'à 15 000 décès sont rapportés dans la province (50 000 au Canada). Elle est d’origine asiatique, mais on lui attribue à tort le qualificatif d’"espagnole".
Cause des décès par tranche d'âge au Québec pendant la grippe "espagnole" (influenza) en 1918.
Âge |
Influenza |
Pneumonie |
Bronchite |
Total |
0-4 |
2672 |
402 |
1510 |
4584 |
5-19 |
2387 |
236 |
102 |
2725 |
29-34 |
5378 |
476 |
98 |
5952 |
35-44 |
1145 |
205 |
33 |
1383 |
45-59 |
672 |
224 |
31 |
927 |
60+ |
617 |
424 |
92 |
1133 |
Inconnu |
668 |
27 |
8 |
703 |
Total |
13539 |
1994 |
1874 |
17407 |
Source: Denis Goulet 2020.
1918-1921
Plus de 9800 cas de dyphtérie sont rapportés, ainsi que plus de 4000 cas de scarlatine (Rapports annuels du Conseil d'hygiène de la province de Québec, 1903 à 1925)
1919
Programme de vaccination contre la variole. Le programme de vaccination gratuite contre la variole d’envergure provinciale est débuté en 1919; il sera cessé en 1971.
- Dans les années 1920, un vaccin contre la diphtérie sauve la vie de milliers d'enfants. La province de Québec s'impose même comme un chef de file de la vaccination. C'est de plus à Montréal que sont menés les premiers tests sur le vaccin BCG contre la tuberculose. Plus de 2000 nouveau-nés reçoivent les premiers vaccins par voie orale.
1920
Épidémie d'influenza. Montréal est de nouveau touché par la grippe en février 1920. L'Hôpital Notre-Dame porte secours à la municipalité. Le nombre de cas est moins élevé qu'en 1918, mais les malades sont gravement atteints. Du 20 janvier au 2 mars 1920, on rapporte 632 décès (taux de létalité de 16%) à Montréal (Goulet 2020). Ailleurs en province on dénombre 1855 décès pour un taux de létalité très élevé de 20%.
1923 à 1925
La tuberculose, un problème majeur de santé publique au Québec. La tuberculose cause 3 000 décès par an au Québec. Le Conseil provincial d’hygiène lance une campagne de lutte contre cette maladie et la mortalité infantile. On recommande à la population de se prémunir des mouches, comme vecteurs de propagation des maladies contagieuses.
1925-1926
Introduction du vaccin BCG (bacille de Calmette-Guérin). Le vaccin BCG est mis au point par l’Institut Pasteur de Paris au début des années 1920. Le Dr Armand Frappier est le premier chercheur nord-américain à confirmer son efficacité contre la tuberculose. Le Pr JA Beaudoin, de l’Université de Montréal, entreprend également en 1925 une étude sur le vaccin BCG afin de prévenir la tuberculose. Le vaccin BCG est utilisé largement pour la première fois en 1926 dans la province de Québec. Des cliniques de vaccination contre la tuberculose sont établies à Montréal.
1926 à 1933
Introduction de la vaccination contre la diphtérie. L’anatoxine diphtérique est introduite au Canada en 1926. Le service provincial d’hygiène, par les Unités sanitaires nouvellement créées, lance une campagne de vaccination antidiphtérique en 1929. Le programme provincial de vaccination gratuite contre la diphtérie est introduit en 1931. En 1933, la première grande campagne de vaccination contre la diphtérie est entreprise avec la participation de la radio et des presses francophone et anglophone,l’organisation de séances de projection d’un film sur la vaccination des nourrissons ainsi que de pièces de théâtre éducatives.
- 1927 Double épidémie de fièvre typhoïde dans la région de Montréal. Une double épidémie de fièvre typhoïde survient dans la région de Montréal durant l’hiver et le printemps de 1927. Un cumul d’au moins 5 353 cas et 533 décès (léthalité de 10,0 %) est rapporté.
- 1929 Mortalité infantile au Québec. Avec 9 810 décès chez les nourrissons en 1929, le Québec figure en tête parmi les neuf provinces canadiennes pour la mortalité infantile.
1929 à 1932
Épidémies de paralysie infantile Des épidémies de poliomyélite sont rapportées dans la province de 1929 à 1932. Une épidémie de 744 cas survient entre le mois d’août et le mois de novembre 1931; la létalité est de 10 %. Pendant cette période, la Division des laboratoires du Service provincial d’hygiène division prépare et distribue 1 000 flacons de 25 cc de sérum de convalescents pour le traitement des cas de poliomyélite aiguë.
1932 à 1935
Quelques statistiques sanitaires au Québec. Selon le 8e rapport annuel du Directeur
du Service provincial d’hygiène de 1932, le taux moyen de mortalité infantile par 1 000 naissances dans les 17 comtés munis d’Unités sanitaires était respectivement de 141,4, 106,1 et 85,8 en 1926, 1929 et 1932. Le taux de mortalité par diphtérie qui avait chuté très progressivement depuis le début du siècle, de 35,6/100000 en 1906 à 6,4/100 000 en 1932, passe à 2,1 en 1933, 3,5 en 1934 et 2,4/100 000 en 1935.
1935
Épidémie de fièvre entérique dans un hôpital de Montréal. Du 1er juillet au 12 août 1935, 17 cas cliniques vérifiés de Salmonella Paratyphi A, S. Paratyphi B et S. Typhi surviennent dans un hôpital de Montréal.
- Entre le années 1940 et 1950. Augmentation des cas de polyomélite. Dans ces années on observe outre les paralysies (dans 37% ddes cas) jusqu'à 5% de décès.
1943
La vaccination systématique contre la coqueluche est approuvée au Canada.
1944
Épidémie de diphtérie à Montréal. Près de 300 cas de diphtérie sont signalés dans le quartier Hochelaga de Montréal. Il s’agit de la dernière épidémie de diphtérie au Québec jusqu’à celle survenue en 1974 sur la Côte Nord. Selon le ministère des Affaires sociales (MAS), l’évolution de la diphtérie dans la province pouvait se diviser en trois périodes: épidémique (1895 à 1939); endémique (1940 à 1962); sporadique (1962 à 1974).
1946
Épidémie de poliomyélite. Une épidémie de 1612 cas de poliomyélite survient en 1946 au Québec et 115 mortalités, avec une létalité de plus de 4,7%.Les hopitaux du Québec sont débordés. (Goulet 2020)
1946
Introduction de la vaccination contre la coqueluche au Québec. Le programme de vaccination gratuite contre la coqueluche d’envergure provinciale est débuté en 1946. Les Unités sanitaires vaccinent à la fois contre la diphtérie et la coqueluche.
1948 à 1976
Programme de vaccination gratuite contre la tuberculose d’envergure provinciale La vaccination systématique des élèves des écoles du Québec est introduite. Elle sera poursuivie jusqu’en 1976. La mortalité due à la tuberculose a diminué suite à l’application de cette mesure.
1949
Introduction de la vaccination contre le tétanos au Québec
1955 à 1957
Introduction de la vaccination contre la poliomyélite au Québec Une campagne de vaccination de masse contre la poliomyélite, visant l’ensemble de la population, est réalisée en 1957.
1957
.Pandémie mondiale de grippe asiatique, de type H2N2. Entre 2 et 3 millions de décès dans le monde entre 1956 et 1958, près de 7000 au Canada. Les scientifiques connaissaient déjà bien les virus grippaux de type H1N1. Et s’il existe alors des vaccins antigrippaux, ils ne sont pas efficaces contre ce nouveau virus. La grippe atteint l’Amérique à l’été et pénètre au Québec en septembre 1957. Le paquebot Ivernia, parti du Havre, accoste à Québec avec à son bord 64 passagers atteints de la maladie. Ceux-ci sont répartis dans quatre hôpitaux de la Capitale et le navire poursuit sa route vers Montréal. L’épidémie se répand rapidement et de nombreuses écoles sont fermées. Heureusement, il n’y aura que peu de victimes au Québec, 11 au total dont 4 cas documentés en Outaouais. Cette pandémie a eu pour conséquence la préparation du premier vaccin pour lutter contre une pandémie.
1959
Nouvelle épidémie de poliomyélite. Une nouvelle épidémie de poliomyélite (due essentiellement au poliovirus de type 1) débute au Québec à la fin d’avril 1959; 1 039 cas sont rapportés, dont 934 à Montréal. L’efficacité estimée du vaccin de type Salk est de 87 %.
1962
Introduction du vaccin vivant atténué contre la poliomyélite au Québec Le vaccin trivalent à virus vivant atténué contre la poliomyélite (Sabin) est introduit au Québec en 1962; il sera utilisé jusqu’en 1999.
1962
Dernier cas de variole rapporté au Canada. Le dernier cas de variole au Canada (infection acquise au Brésil) est rapporté à Toronto.
1968
Epidémie de grippe A (H3N2) (Hong Kong influenza), repérée à la mi-68 dans l’enclave de Hong Kong, fait le tour de la planète en un an et demi, tuant au total un million de personnes, dont 50 000 aux États-Unis et 31 000 en France entre 1968 et 1970. On mentionne 4000 décès au Canada et pour le Québec, le Journal La Patrie mentionne 17 décès en une seulle journée dans son édition du 12 janvier 1969 mais aucun dénombrement n'est connu pour l'ensemble de la province - à juste titre on mentionne qu'à défaut d'autopsie, il est difficile de distinguer les mortalités dues aux complications de cette grippe et celles de la grippe ordinaire.
- Quant au taux de décès parmi les personnes atteintes lors des pandémies de 1957-58 et 1968, ils ne seront que de 0,2%, contrairement à la grippe "espagnole" dont le taux avoisinait 3-4%.
1970-1971
Introduction des vaccins contre la rougeole et la rubéole au Québec Le vaccin vivant atténué contre la rougeole est introduit au Québec en 1970, suivi du vaccin vivant atténué contre la rubéole en 1971.
1971
Introduction du programme annuel d’immunisation contre l’influenza au Québec.Ce programme cible certains groupes de la population à risque de développer des complications de la grippe.
1974
Éclosion de diphtérie sur la Côte-Nord Il s’agit vraisemblablement de la dernière éclosion de diphtérie rapportée au Québec.
1976
Introduction des vaccins contre la rougeole, la rubéole et les oreillons (RRO) au Québec. Le vaccin vivant atténué monovalent contre les oreillons est introduit au Québec en 1976, suivi du vaccin
trivalent RRO.
1979-1980
Épidémie de rougeole au Québec Plus de 3000 cas sont déclarés au Québec en 1979-1980.
Synonymes
- Diphtérie : une maladie infectieuse contagieuse due à une bactérie productrice d’une toxine, Corynebacterium diphtheriae ou bacille de Löffler-Klebs, touchant d'abord les voies respiratoires supérieures, puis le cœur et le système nerveux périphérique.
- Fièvre typhoïde : typhoïde, également connue sous le nom de fièvre typhoïde ou de fièvre entérique est une infection provoquée par la bactérie Salmonella typhi; Décès constaté au Québec dans 1% des cas même avec un traitement.
- Grippe espagnole : causée par un virus, est une grippe A (H1N1); la moitié des morts sont des adultes de 20 à 40 ans, alors que la grippe classique décime presque uniquement les bébés et les personnes âgées.
- Rubéole ou rougéole : 'fièvre rouge', dans les écrits anciens il pourrait aussi s'agir de scarlatine; la rubéole est une maladie très contagieuse causée par un virus, elle survient surtout en hiver et au printemps; est habituellement bénigne, elle peut toutefois entraîner des complications, particulièrement pour les femmes enceintes, par exemple, la rubéole peut entraîner une fausse couche ou des malformations chez le fœtus.
- Tuberculose : 'peste blanche', reste encore aujourd'hui une maladie incomprise pour beaucoup de personnes.
- Typhus : 'fièvre jaune', provoqué par des bactéries; les cas mortels sont rares chez l'enfant de moins de 10 ans, mais la mortalité augmente avec l'âge et peut atteindre 60% chez les patients de plus de 50 ans, non traités.
- Variole : 'grande picote', 'petite vérole', 'peste indienne' - avant les années 1800 le terme est imprécis tout comme la certitude qu'il s'agit bien de cette maladie; dûe à un virus, la variole est surnommée "petite vérole" en référence à la syphilis qui a été surnommée "grande vérole", mais les deux maladies n'ont rien en commun étiologiquement.
Références
Outres celles mentionnées dans le texte:
- Denis Goulet, Brève histoire des épidémies au québec Du choléra à la COVID-19. Les Éditions du Septentrion. 2020.
- Rapports annuels du Conseil d'hygiène de la province de Québec, 1895 à 1926.(RACHPQ)
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J.-Roger Cloutier. Dictionnaire historique concernant Belœil, McMasterville, Saint-Mathieu-de-Belœil, Mont-Saint-Hilaire et Otterburn Park. Société d'histoire et de généalogie de Belœil--Mont-Saint-Hilaire. 2020.
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Diapositive 1 sur les pandémies de l'Institut National de la Santé Publique du Québec.[LIEN]
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Côté-Gendreau, Marielle. Les registres paroissiaux témoins de l’histoire : L’épidémie de choléra de 1832-1834. Le Blog de l'Institu Drouin 2020. [ LIEN ] Valide 2023.
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Louise Côté. En garde - les représentations de la tuberculose au Québec dans la première moitié du XXe siècle, maladie, culture et identité. Thèse de Doctorat U.L. 1997.
- Yves Landry et Rénald Lessard, 2008. Les causes de décès aux XVIIe et XVIIIe siècles d’après les registres paroissiaux québécois. Revue d'histoire de l'Amérique française, Volume 48, Numéro 4, printemps 1995, p. 509–526.
* Richard Auguste Poulin 3-3-2021.