Joseph Poulin 1715-1799

1 - Joseph - naissance, mariage et établissement en Beauce

En 1741 Joseph s'installe sur une terre de la rive ouest de la rivière Chaudière près de Vallée-Jonction. Aujourd'hui, ce lieu est identifié par une pierre placée en juin 1987 où on peut lire: « En l'honneur de nos ancêtres Poulin de Beauce ». C'est la terre que Joseph a défriché et qui se trouvait près de celle du propriétaire de la seigneurie au pied de la Côte des Fermes.

Le premier Poulin qui vint s'établir à Saint-Joseph de la Nouvelle-Beauce fut Joseph Poulin, dont voici l'extrait de baptême :

Le 27ième jour du mois de mai 1715, ai baptisé solennellement en cette église par moi prêtre curé de cette paroisse (Sainte-Arme-de-Beaupré), Joseph, né cet après-midi, fils de Jean Poulin et d'Agnès Drouin, son épouse ; le parrain a été Joseph Poulin, cousin-grand et la marraine Catherine tante de l'enfant, fille d'Étienne Drouin, de la paroisse du Château-Richer, qui a déclaré ne pouvoir signer. Le parrain a signé (Signé) Joseph Poulin, Chabot, ptre.

Dans son enfance, Joseph fréquenta une école quelconque, car il savait signer comme on le verra dans la suite. Est-ce son curé qui lui montra à lire ou s'il apprit les éléments de la langue française en suivant les leçons de quelque :naître ambulant ?

Plus tard, dans certains actes où il figure soit comme le père, le parrain ou comme témoin, il est le seul à signer. Chose curieuse, le prêtre qui rédigeait les actes était tellement habitué à écrire : " tous ont déclaré ne savoir écrire ni signer ", que Joseph Poulin, qui se trouvait présent quelquefois, ne signait pas tel acte quand il avait signé l'acte précédent. On a trop souvent déploré l'ignorance des canadiens. On devrait savoir que la vieille formule : " n'a pu signer " né veut pas dire autre chose, le plus souvent, que : " N'a pas voulu signer, n'a pas jugé à propos, n'a pas été requis de signer ". Joseph, âgé de 24 ans, conduisait à l'autel une jeune fille du nom de Angélique Paré, fille d'Étienne Paré et de Anne Lacroix, de Sainte-Anne. Voici leur extrait de mariage :

L'an 1739, le 13ième jour du mois de mai, après avoir publié trois bans de mariage au prônes des messes paroissiales, les troisième et quatrième dimanches après Pâques, en le jour de la fête des saints Jacques et Philippe, entre Joseph Poulin, fils de Jean Poulin et de Agnès Drouin, ses père et mère, habitant de la présente paroisse (Sainte-Anne-de-Beaupré) d'une part; et Angélique Paré, fille d'Étienne Paré et de Anne Lacroix, les père et mère habitant de la présente paroisse d'autre part ; sans qu'il s'était découvert aucun empêchement ni civil ni canonique, et nous soussigné avons reçu leur mutuel consentement et leur avons donné la bénédiction nuptiale avec les cérémonies prescrites par la sainte Eglise, en présence de Jean Paré, aieul de l'épouse, Prisque Paré, oncle de l'épouse, d'Étienne Paré, père, d'Étienne Racine, de Pierre Poulin, frère de l'époux et de plusieurs autres parents et amis lesquels aussi bien que les parties contractantes ont déclaré ne savoir signer et enquises en foi de quoi avons signé seul. (Signé) Navière ptre.

Jean Poulin, père de Joseph, n'assistait pas au mariage, il était sans doute parti en voyage, ses devoirs de sergent de milice l'ayant appelé ailleurs

L'année suivante, le 18 février 1740, selon la coutume à laquelle ne manquaient pas nos ancêtres, coutume transmise à leurs descendants, ce jeune couple recevait la visite des sauvages appelée de nos jours " le passage de la cycogne ". Sans doute, pour marquer toute sa joie d'avoir pour premier-né un fils, il ne crut mieux faire que de, lui donner son nom Joseph Poulin, baptisé en l'église de Sainte-Anne-de-Beaupré. Faire porter à un de ses enfants le nom de Joseph était déjà une tradition dans les familles Poulin, tradition pieusement conservée jusqu'à nos jours, car il est difficile de rencontrer une famille qui n'a pas son " Joseph ", voulant ainsi honorer notre patron national, saint Joseph, et solliciter de ce grand saint sa paternelle protection.

En 1742, Joseph était désormais fixé à la Beauce ; dans le premier cahier qui servit de registre, cahier aux coins rongés par les ans, cahier qu'il faut manipuler avec une délicatesse excessive pour ne pas voir les bouts de papier s'envoler emportant avec eux des parcelles d'extraits, les seuls témoins de cette époque primitive , on y trouve les deux extraits de baptême des deux fils de Joseph : — Etienne Poulin et Louis Poulin.

Étienne fut baptisé le 22 octobre 1742 dans la petite chapelle sise sur la rive nord de la rivière Chaudière. L'été dernier, au mois d'août 1938, lors des fêtes du deuxième centenaire de la fondation de la paroisse Saint-Joseph, Beauce, on eut la louable pensée d'ériger une magnifique croix pour rappeler aux générations actuelles et futures le site de cette première chapelle en terre beauceronne où furent baptisés les premiers ancêtres.

Deux ans plus tard, le 26 mars 1744, Joseph était le père d'un troisième enfant baptisé sous les prénoms de Louis-Joseph, par le Père Hyacinthe, missionnaire récollet, tandis que son frère Etienne recevait le baptême des mains du premier missionnaire de la Nouvelle-Beauce, le Père Carpentier, récollet lui aussi.

Le dernier enfant à naître de ce mariage fut Angélique Poulin ; elle fut baptisée le 1er novembre 1745, par l'abbé Leclerc dont la calligraphie est pratiquement illisible. Vingt ans plus tard, le 26 janvier 1765, elle épousait Jean Dupuis, fils de Jean Dupuis et de Jeanne Montreuil, de Saint-Joseph. Le 28 juin 1747, à ce temps de l'année où la nature est débordante de vie, Angélique Paré, épouse de Joseph Poulin, décédait, à peine âgée de 30 ans, ayant reçu comme ses grand-mères, les sacrements de Pénitence, d'Extrême-Onction et le saint Viatique ; après les cérémonies accoutumées de notre mère la sainte Eglise, son corps fut inhumé dans le petit cimetière, près de la chapelle. Le seul qui signa l'acte de sépulture fut Alexis Duburon, prêtre-missionnaire, que l'on retrouve plus tard au Château-Richer.

2 - Deuxième mariage de Joseph

Joseph ne resta veuf que quatre mois, car le 10 novembre 1747, tout comme la plupart des nouveaux colons de la Nouvelle-Beauce, qui, après avoir bâti leur petite maison en bois rond " sur le bord de l'eau ", retournaient au lieu de leur naissance chercher la femme qui devait égayer leur maisonnette, Joseph retourna sur la côte de Beaupré chercher sa seconde femme, non à Sainte-Anne, mais cette fois-ci à l'Ange-Gardien. Elle avait pour nom Marie-Marguerite Huot, fille de René Huot et de feue Louise Parent de l'Ange-Gardien. Voici une partie de l'extrait de mariage :

Le 10ième jour de novembre 1747, après la publication de trois bans de mariage, entre Joseph Poulin, veuf de défunte Angélique Paré, habitant dans la Nouvelle-Beauce (Saint-Joseph) et Marie-Marguerite Huot, fille de René Huot et de défunte Louise Parent, les père et mère de l'Ange-Gardien. . en présence de Jean Poulin, père de l'époux Louis Huot, frère de l'épouse, de Louis Fafard, beau-frère et autres parents et amis qui ont signé. (Signé) Joseph Poulin, Marie Huot, R. Huot, etc.. . Brassard, ptre.

Le 6 novembre 1747, par devant. Pierre Huot, notaire, Joseph Poulin et Marie Huot faisaient leur contrat de mariage. Le premier enfant né de ce second mariage fut Pierre baptisé en 1748, lequel mourut célibataire à l'âge de 52 ans, en l'année 1800. Cette même année 1748, Joseph Poulin fut élu marguiller ; il était le quatrième à exercer cette importante fonction à Saint-Joseph, corps qui avait fait son apparition en 1741 et qui donna un peu de " tintoé " au curé et aux évêques, lequel corps tenait dignement autant qu'obstinément et avec raison à une des clefs du coffre à deux serrures, dit l'abbé Nadeau, corps qui a rendu de grands services à l'église mais qui est devenu aujourd'hui une charge plutôt honorifique.

Marie Geneviève Poulin fut la deuxième enfant du second mariage de Joseph Poulin. Mariée le 9 janvier 1775 à Jean-Baptiste Bourbeau, elle vint se fixer à Québec pour y demeurer jusqu'en 1831. Elle mourut cette année-là à l'âge vénérable de 90 ans d'après l'extrait de sépulture, (âge qui n'est pas exact) et fut inhumée dans le cimetière des " picotés ". Malgré son âge aurait-elle été atteinte elle aussi par cette épidémie qui fit mourir tant de monde à cette époque ? Vers 1800, à Québec, une autre épidémie éclata, et les médecins ne purent trouver le nom de cette maladie qui fit mourir beaucoup de personnes. Cette maladie fut appelée " maladie populaire ". (D. T.)

Marie Louise Poulin, la deuxième des filles, naquit le 26 octobre 1753 et eut comme parrain Pierre Bureau et pour marraine Marguerite Cliche, femme de Claude, frère de Joseph, son père. En 1781, elle épousait Etienne Vachon, dont l'ancêtre Paul Vachon était notaire royal et demeurait à Beauport.

L'année suivante, le 20 décembre 1754, était baptisée une fille sous le prénom de Marguerite Poulin ; parrain : Pierre Boulet et marraine : Marie-Anne Thibault. Le 14 novembre 1785, elle épousait Ignace Veilleux, fils de Augustin Veilleux et de Françoise Guérin, de Saint-Joachim.

Josette Poulin [Josette], vint au monde le 22 mars 1756 et fut baptisée par le Père Justinien; elle eut comme parrain Pierre Jacques, et pour marraine Angélique Albert ; elle fut mariée, le 13 juin 1770, à 24 ans, à Augustin Huard, veuf.

Encore une autre fille; celle-ci fut baptisée sous le nom de Marie Cécile Poulin, le 12 août 1758, par le Père Justinien ; elle eut comme marraine Cécile Lavoie et pour parrain René Grondin, l'ancêtre des Grondin de la Beauce. A l'âge de 21 ans, elle épousait Pierre Poirier, le 13 juillet 1779, dont l'ancêtre Poirier venait de Beauséjour, en Acadie. Cécile fut inhumée le 13 janvier 1844, à l'âge de 86 ans, à Saint-Joseph, Beauce.

La dernière des filles, baptisée le 4 juillet 1760, reçut pour nom Charlotte Poulin, appelée dans la suite Charlotte; son parrain fut Athanase Poulin, son oncle, maitre-maçon et sa marraine Margue-rite Jobin, sa tante. Le 2 juillet 1782, à Saint-Joseph, elle épousait, à l'âge de 22 ans, Augustin Jacques, fils de Pierre Jacques et de Cécile Doyon. La série des filles est terminée.

Cette fois-ci ce fut un garçon, né hier sur les cinq heures de relevée et baptisé le lendemain, le 26 avril 1762 ; son parrain fut Charles Maheu d'où son nom de Charles Poulin, et la marraine fut sa tante Félicité Poulin.

Le dernier des enfants qui naquit de cette seconde union fut Jean Poulin, né d'hier sur les quatre heures de l'après-midi et baptisé le lendemain, le 21 janvier 1766. Il prit au baptême le nom de son oncle, Jean Jobin, et eut pour marraine Marthe Bolduc, seconde femme de Pierre Poulin, son oncle.

3 - Épilogue

Onze ans après la naissance de son dernier enfant, Marie Huot décédait à l'âge de 54 ans, munie de tous les sacrements et était inhumée trois jours après, le 10 février 1777, en présence de Joseph Poulin, son époux, de Pierre Poulin, son beau-frère, de Jacques Ducharme, de Jean Doyon et de plusieurs autres témoins et amis qui ont tous déclaré ne savoir signer. Le service fut chanté par l'abbé Verreault, curé de Saint-Joseph. La même année, Jean, le vieux père de Joseph, de Pierre, et de Claude, mourut, le 12 août, à Saint-Joseph, où il demeurait chez son fils aîné depuis 1760, à l'âge de 89 ans. Quoique veuf depuis 1742, il ne s'était pas remarié; d'ailleurs rien le forçait à prendre une seconde femme, car ses enfants étaient tous grands lors du décès de son épouse, et plusieurs même étaient mariés.

Joseph survécut 22 ans après la mort de sa seconde femme. En 1799, à l'âge de 84 ans et non 92 ans comme l'indique son extrait de sépulture, il quittait " cette vallée de larmes " pour le grand voyage de l'Éternité, après une vie de dur labeur et d'un travail acharné pour se tailler un domaine dans la forêt.

A son arrivée à Saint-Joseph de la Nouvelle-Beauce, Joseph Poulin s'établissait à l'endroit où est situé actuellement le bien de M. Félix Jacques. Le 5 décembre 1780, devant le notaire Louis Miré, résidant à Beauport, il vendait sa terre au sieur Joseph Lessard, au montant de 360 livres de 20 sols la livre. Après cette date, il se fixait définitivement sur la rive sud de la rivière Chaudière; ce bien qui n'a jamais changé de nom depuis 1780 est présentement occupé [en 1939] par M. Auguste Poulin. Extrait de sépulture de Joseph Poulin :

Le 11 novembre 1799, par nous soussigné curé. a été inhumé dans le cimetière le corps de Joseph Poulin, décédé avant-hier, muni des secours de l'Église, âgé de 92 ans, époux de défunte Angélique Paré. Présents Joseph et Etienne Poulin, fils, Jacques Lessard, Augustin Morency, Antoine Vachon. Pierre Lessard et beaucoup d'autres. Lamothe ptre.

[Tricentenaire]